Seconde Chance
Chapitre II : Triangle


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Auteur:   Aline

Date de création:   Juin 2001

Droits divers:   Les personnages sont la propriété de Michael Crichton, de la WB, d'Amblin et de la chaîne qui détient les droits de diffusion, la FOX.

Résumé   Susan est de retour à Chicago et Mark commence à remettre en question sa relation avec Elizabeth.

Fanfic tous publics

Le texte est la propriété de l'auteur

***

I'm watching now
[Je regarde autour de moi à présent]
And I'm seeing others as they pass me by
[Et j'observe les autres qui passent à côté de moi]
It's not a pretty sight, but it will be someday
[Ce n'est pas une très belle vue, mais ça le sera un jour]
And it's not that I'm afraid of losing you
[Et ce n'est pas que j'aie vraiment peur de te perdre]
I'm afraid of me, and what my choices might do
[J'ai peur de moi, et des conséquences que mes choix pourraient avoir]
All the time I seem to wonder how all this is gonna end
[Tout le temps je semble me demander comment tout cela va se terminer]
< Will you stay with me forever
[Vas-tu rester avec moi pour toujours]
And tell me that you'll never go away
[Et me dire que tu ne me quitteras plus jamais]
Maren Ord - Waiting

***

La journée avait été longue et épuisante pour tout le monde. En fin de matinée, les ambulances avaient amené aux urgences plusieurs blessés graves. Une fusillade avait eu lieu dans une école primaire, et, à part quelques professeurs, toutes les victimes étaient des enfants âgés de 6 à 14 ans qui n'avaient pas tous pu être sauvés, malgré les efforts déployés par les urgentistes et les chirurgiens.

Mark arriva chez lui vers six heures le même soir, complètement exténué. Le manque de sommeil de la nuit précédente et la journée qu'il venait d'avoir en étaient bien entendu les principaux responsables, mais l'état nerveux dans lequel il se trouvait depuis quelques jours y était aussi pour quelque chose. Peu avant, Carter avait invité Susan à aller manger quelque part dans la soirée et il leur avait proposé de les accompagner, Elizabeth et lui. Bien entendu, il n'avait pas pu refuser, mais se demandait à présent s'il avait eu raison. Il n'y voyait plus très clair et avait besoin d'un conseil. C'est pourquoi il pris le téléphone et composa un numéro qu'il n'avait jamais encore eu le courage d'appeler.

***

Au même instant, le téléphone sonna dans une petite maison de l'autre côté des Etats-Unis, à Seattle.

" Laisse, j'y vais " cria Doug à Carol qui finissait d'habiller Kate et Tess, leurs deux jumelles. " Doug Ross ? " fit-il en décrochant.

" Salut Doug, c'est Mark "

" Mark ?! Ca alors ! Si je m'attendais à ce que tu appelles ! Comment ça va, vieux ? Ca fait un bail dis donc ! "

" Ca peut aller. "

" Pas mieux que ça ? "

" Doug, ça me gêne de t'appeler pour ça alors que je ne l'ai jamais fait avant, mais j'ai besoin que tu m'aides, je ne sais plus où j'en suis… "

Doug s'adossa au mur. " Je t'écoute, qu'est-ce qui t'arrive ? "

" Susan est revenue "

" Susan… tu veux dire NOTRE Susan ? Susan Lewis ??? "

" C'est ça "

" Et alors, tu devrais être content. Ne me dis pas que ce n'est pas le cas ! "

" Bien sûr que non, je suis bien plus que content de la revoir… C'est juste que… je ne sais pas quoi faire, je ne sais pas ce qu'elle attend de moi… et puis, il y a Elizabeth… "

" Elizabeth ? Ah oui, c'est vrai, Carol m'a dit pour toi et le Dr Corday. Tu sais Mark, je n'ai pas de solution toute faite à te donner. Il faut que tu suives ton cœur, fait ce qu'il te dicte. "

" Ce n'est pas facile "

" La vie n'est pas facile. Ecoute, là tu tombes assez mal, Carol et moi avions prévu de passer chez des amis avec les filles, il va falloir que je te laisse. Mais tu réfléchis et je t'appelles demain, ça te va ? "

" Merci Doug "

" De rien. Ca m'a fait plaisir de t'entendre. "

" Moi aussi. Embrasse Carol et les filles pour moi "

" Je n'y manquerai pas. Dis à Susan qu'elle nous manque "

Doug raccrocha et rejoignit Carol dans la chambre des deux petites filles.

" C'était qui ? " demanda-t-elle en finissant de lasser les petites chaussures de Kate tandis que Tess se démenait déjà pour retirer les siennes.

" Mark " répondit Doug en prenant le second bébé dans ses bras.

" Il va bien ? "

" Je crois. Susan Lewis est de retour à Chicago. "

" C'est vrai ? C'est super ! Il faudra que je l'appelle, ça fait longtemps qu'on ne s'est plus parlé… " Elle remit la robe de Kate en place et la prit dans ses bras. " Voilà, on peux y aller "

***

Abby entra en trombe dans la salle de repos. En retard pour la énième fois, il valait mieux pour elle que Kerry ne lui tombe pas dessus à ce moment-là. Alors qu'elle ouvrait son casier pour en sortir sa blouse, elle remarqua qu'elle n'était pas seule comme elle l'avait d'abord cru. Elle se retourna et aperçu Carter, assis à une table, la tête dans les mains.

" Hé John ! Quelque chose ne va pas ? "

Il releva la tête vers elle. Il ne l'avait pas entendue entrer.

" Ca va. " fit-il. " Longue journée "

" Oui, selon Dave j'aurais manqué une journée "intéressante" "

" Un malade a déboulé dans une école primaire et a tiré sur tout ce qui bougeait. Quatre gosses sont morts, douze ont été grièvement blessés, journée très intéressante en effet. "

" Dave est un ours " fit-elle en lui souriant.

Il leva la tête et esquissa un sourire. " C'est le moins qu'on puisse dire "

Au même instant, la porte s'ouvrit et Susan entra et se dirigea vers la machine à café.

" Dr Lewis ? " fit Carter en la voyant. " Vous ne deviez pas terminer à trois heures et aller patiner avec votre sœur et votre nièce ? "

" Ca aurait peut-être été possible si une certaine Kerry Weaver ne m'avait pas convoquée la moitié de l'après-midi dans son bureau pour des "détails administratifs de dernière minute"… Quelqu'un veut du café ? "

" Je veux bien " répondit Abby tandis que Carter secouait la tête.

" Tu n'as pas très bonne mine Carter " fit Susan en tendant une tasse à Abby.

" Je suis crevé. Je ne crois pas que je vais venir ce soir, il vaut mieux que je rentre chez moi et que je dorme une dizaine d'heures au moins. Je ne vous laisse pas toute seule, de toute façon Mark et Elizabeth ont dit qu'ils viendraient avec nous "

Susan reçu comme un grand choc dans la poitrine. Elle allait se retrouver seule avec Mark et sa nouvelle petite amie. Jamais une situation ne l'avait embarrassée à ce point. Quelle idée Carter avait-il donc eu de les inviter !

" Je… je ferais sans doute mieux de les laisser en tête-à-tête… "

" Non, allez-y, il n'y a pas de raison "

Bien évidemment, Carter ne pouvait pas être au courant de ce qui s'était passé la nuit précédente. Il ne pouvait pas non plus lire dans sa tête les sentiments qu'elle éprouvait toujours, qu'elle n'avait jamais cessé d'éprouver à l'égard de Mark ni qu'elle savait qu'ils ne pourraient pas continuer éternellement à refouler le désir qui les rongeait tous deux. Elle voulait l'avoir auprès d'elle et rien que pour elle, et le voir en compagnie d'Elizabeth était une vraie torture.

" Oui, tu as raison, j'irai " Elle lui sourit et il en fit de même, avant de sortir de la salle de repos, la laissant seule en compagnie d'Abby. Susan s'assit sur une chaise, pensive, et Abby vint s'asseoir en face d'elle.

" Je ne veux pas avoir l'air de me mêler de ce qui ne me regarde pas mais… le Dr Greene, c'est plus qu'un ami pour vous, je me trompe ? "

" Je vous demande pardon ? " fit Susan en relevant la tête vers la jeune femme.

" Vos yeux, ils brillent quand vous parlez de lui "

Susan sourit. " C'est compliqué "

" Rien n'est jamais simple " répondit Abby en se levant pour aller travailler. " Bonne soirée ! "

Susan hocha la tête, puis, après quelques minutes, se leva à son tour, pris ses affaires et quitta l'hôpital pour rentrer chez elle.

Elle arriva à son appartement près d'une demi-heure plus tard. A cause des gelées violentes de la nuit précédente, de nombreux embouteillages s'étaient formés et elle s'était promis que dorénavant elle laisserait sa voiture chez elle et prendrait le métro. Elle se débarrassa de son manteau, de ses bottes et de son écharpe et se rendit à la salle de bain où elle se fit couler un bain bien chaud. Il lui restait deux heures avant de devoir retrouver Mark et Elizabeth et elle devait vraiment se détendre et remettre un peu d'ordre dans ses idées. Elle se glissa avec délectation dans l'eau brûlante qui lui picota la peau. Une seconde, elle imagina ce qu'il se serait produit si elle n'était pas partie, si elle était restée après qu'il lui ait avouer son amour sur le quai de la gare. Ils seraient certainement toujours ensemble, pourquoi ne serait-ce pas le cas ? Elle soupira profondément. La même question la tourmentait toujours : pourquoi était-elle partie ? Il aurait été si facile pour elle de ne pas monter dans le train, de rester là, avec lui. Non, c'était faux. Ca n'avait jamais rien eu de facile. Elle avait espérer qu'il lui demande de rester jusqu'à la dernière seconde, et elle savait pertinemment que s'il l'avait fait un jour, une heure plus tôt, elle n'aurait même pas eu à réfléchir. Mais là, il l'avait prise au dépourvu. Pour elle, il était clair qu'il ne viendrait plus, qu'il ne l'aimait sans doute pas assez pour lui dire de ne pas partir, qu'il ne l'aimait pas de la façon dont elle c'était le cas pour elle. Cette idée la déchirait, mais elle n'avait eu d'autre choix que de s'y résoudre. Aussi, lorsqu'elle l'avait vu, courant sur le quai, quelques minutes à peine avant que son train ne parte, elle avait été prise de panique et n'avait pas su comment réagir. Monter dans ce maudit train avait été comme un réflexe, même si, quelques instants plus tard, lorsqu'elle avait réalisé ce qu'elle venait de faire, elle n'avait eu qu'une seule envie : faire demi-tour, sauter du train et courir le rejoindre. Mais c'était trop tard, elle ne pouvait plus revenir en arrière.

Elle soupira une nouvelle fois alors qu'elle reprenait lentement ses esprits. A présent, elle avait la possibilité de sauter du train, fallait-il seulement qu'elle en trouve le courage. Mais ce dont elle était sûre, c'est qu'elle ne le laisserait pas s'envoler loin d'elle, pas une seconde fois.

***

Elizabeth arriva chez elle un peu plus tard qu'elle ne l'avait prévu. Elle était complètement épuisée, et l'idée de devoir ressortir de chez elle pour aller manger avec Mark, Carter et Susan était loin de la réjouir. Elle aurait largement préféré rester à la maison, devant un vieux film à manger du pop corn - elle se rendit d'ailleurs compte à quel point elle avait été "américanisée" depuis son arrivée. Mais Mark ne lui avait guère laissé le choix et elle se serait sentie idiote de lui dire qu'elle ne les accompagnerait pas. Et puis, elle voulait autant que possible éviter de laisser Mark seul en compagnie de Susan, elle préférait être présente. Elle soupira tandis qu'elle retirait ses vêtements et qu'elle entrait dans la douche. L'eau brûlante lui coula dans le dos, sur le visage. Tout aurait été tellement plus simple si elle n'était pas revenue ! Pourquoi n'était-elle donc pas rester là-bas, à Phœnix ? Pour qui se prenait-elle pour revenir ainsi, après tout ce temps, et pour tenter de re-séduire Mark ? Oui, il avait été amoureux d'elle, mais elle était partie ! Les larmes commencèrent à couler le long des joues d'Elizabeth, se mêlant à l'eau qui dégoulinait sur son visage. Cette situation était insupportable. Elle ne savait même pas ce que Mark pensait, s'il aimait encore Susan ou non, s'il allait partir ou rester auprès d'elle. Elle secoua la tête. Elle devait cessé de se tourmenter avec tout cela, ça ne la mènerait nulle part. La seule façon pour elle d'être sûre des sentiments de Mark à son égard serait encore de le lui demander. Cette idée la rassura, et elle parvint à finir de se préparer sans se tourmenter davantage.

***

En raccrochant le téléphone, Mark ne s'était pas senti beaucoup plus avancé. Il n'avait pas cessé de repenser à ce que Doug lui avait dit, mais ne parvenait pas à trouver de solution qui lui convienne. " Il faut que tu suives ton cœur ", ça pouvait sembler facile, bien sûr, mais en réalité c'était loin de l'être. Son cœur lui dictait d'avouer à Susan les sentiments profonds qu'il ressentait pour elle, mais sa raison lui disait qu'il avait une relation stable avec Elizabeth, qu'il était heureux avec elle et qu'il n'avait aucune raison que cela ne change. Et il avait tellement l'habitude de suivre sa raison, qu'il ignorait s'il pourrait faire différemment cette fois-ci. Il soupira profondément. Il se sentait pris entre deux feux. Il ne voulait faire de mal ni à Susan ni à Elizabeth, mais ne pouvait pas non plus continuer à faire traîner cette situation qui n'était facile pour personne. Or, quel que soit le choix qu'il ferait, il risquait d'en faire souffrir une des deux. D'un côté, le bonheur que lui avait donné le retour de Susan était si grand qu'il ne trouvait pas de mots pour le définir. D'un autre, tout était devenu incroyablement compliqué depuis qu'elle était revenue.

L'horloge qui se trouvait dans son living room sonna sept heures, le tirant de ses pensées. Il enfila rapidement une veste et sorti de son appartement. Il avait été convenu qu'il aille chercher Elizabeth à sept heures et quart, et qu'ils retrouvent ensuite Carter et Susan une demi-heure plus tard devant le restaurant français où ils avaient décidé de manger.

***

Quarante-cinq minutes plus tard, Mark et Elizabeth arrivaient au restaurant. Susan était déjà là, seule.

" Carter n'a pas pu venir " fit-elle, mal à l'aise, en réponse au regard interrogateur que lui lança Mark. En disant cela, elle lui adressa un petit sourire nerveux et durant une seconde, il ne vit plus rien d'autre qu'elle : ses cheveux blond foncé, mis-long, qui tombaient gracieusement sur ses épaules, son sourire, esquissé par ses lèvres délicates qui, lorsqu'il l'avait embrassée, avaient laissé sur les siennes un goût sucré, ses magnifiques yeux bleus verts dans lesquels la lumière des réverbères allumés dans la rue se reflétaient et faisaient danser une petite flamme innocente. Sans le vouloir, Elizabeth serra sa main un peu plus fort et il retrouva ses esprits. Il sourit à sa petite ami et offrit son bras libre à Susan.

" Tant pis pour lui " fit-il. " On s'amusera sans lui "

Mais en entrant dans le restaurant, entouré par les deux jeunes femmes, il ne pu s'empêcher de regretter son absence.

***

" Que prendrez-vous ? " leur demanda le serveur quelques minutes plus tard, alors qu'ils étaient tous les trois installés à une table. Chacun passa sa commande, et le silence retomba sur eux dès qu'il fut parti.

" Vous êtes de Chicago ? " demanda soudain Elizabeth à Susan.

" Oui, en fait je suis née près de Milwaukee mais j'ai grandit à Chicago. "

" Et vous avez de la famille par ici ? "

Susan se demandait où elle voulait en venir. " Mes parents sont toujours ici, et il y a aussi ma sœur aînée et sa fille… "

Elizabeth sourit. " Vous avez de la chance, toute ma famille habite toujours en Angleterre… Il y a bien ma mère qui me rend visite de temps à autres, mais sinon ils me manquent beaucoup, mon père en particulier… "

Susan lui rendit son sourire. En fin de compte, ce n'était peut-être qu'une simple conversation amicale. Si elle devaient travailler ensemble, il valait peut-être mieux qu'elles apprennent à être amies. " Je n'ai jamais été en Angleterre. Il paraît que c'est un pays magnifique. Qu'est-ce qui vous a amené ici ? "

Mark ne savait que penser. A première vue, cette soirée aurait dû être un échec total, mais apparemment tout avait l'air de bien ce passer. Il s'en sentait rassuré, mais en même temps il ne pouvait s'empêcher de se sentir mal à l'aise.

Elles discutèrent ainsi jusqu'à se qu'on leur serve leurs repas, après quoi la conversation prit une tournure plus médicale, Mark et Susan racontant à Elizabeth quelques cas peu conventionnels qu'ils avaient eu à traiter aux urgences avant qu'elle ne soit là. Peu avant qu'on ne leur apporte leurs desserts, Elizabeth se leva pour se rendre aux toilettes, laissant Mark et Susan seuls. Pendant quelques secondes, il ne parvinrent à prononcer un seul mot, puis Susan décida de se lancer.

" Mark, il y a quelque chose qu'il faut que je te dise… " articula-t-elle après avoir pris une profonde inspiration. Il se contenta de la regarder plus intensément tandis qu'elle continuait. " J'ai beaucoup réfléchis depuis… tu sais, l'autre nuit. Et me suis rendu compte d'une chose… " Elle leva les yeux de son verre qu'elle faisait nerveusement tourner entre ses mains et les plongea dans ceux de Mark. " Je… je t'aime toujours… en fait je n'ai jamais cessé de t'aimer… Je ne voulais pas l'admettre avant, à cause d'Elizabeth… mais je ne peux plus te mentir, me mentir à moi-même… " Elle détourna brusquement la tête et reposa les yeux sur son verre.

" Susan… " A son tour, Mark respira profondément, tandis que la jeune femme relevait timidement la tête. " Je… je ne sais pas " lâcha-t-il finalement, la raison l'emportant sur le cœur. " C'est trop compliqué, et j'aime Elizabeth… "

Les yeux de Susan se remplirent de larmes. Il ne supportait pas de la faire pleurer. " Mais… alors, l'autre soir… ce que tu m'as dit… ? "

" Tu avais sans doute raison… j'étais fatigué, j'avais peut-être bu un peu trop de vin et… " Il s'interrompit en voyant une larme rouler lentement sur sa joue. " Susan, ne m'en veux pas je t'en prie… " Il tendit la main pour la poser sur la sienne, mais elle la retira d'un geste brusque.

" Que je ne t'en veuille pas ? Mark, je t'ouvre mon cœur et toi tu… " Elle ne parvint à terminer sa phrase. Elle se leva rapidement et tourna les talons, le visage ruisselant de pleurs. Mark se leva à son tour pour la suivre, mais lorsqu'elle passa la porte du restaurant presque en courant, il comprit que cela ne servirait à rien. Il se tenait encore dans l'entrée lorsqu'il sentit une main se poser sur son bras. Il se retourna et aperçut Elizabeth à côté de lui.

" Pourquoi Susan est-elle partie ? " demanda-t-elle.

" Elle ne se sentait pas très bien " réussit à articuler Mark en réponse malgré la boule qui se formait dans sa gorge. Ils retournèrent à l'intérieur et terminèrent leurs plats, mais Mark ne pouvais s'empêcher de penser qu'il venait de gâcher la plus belle amitié qu'il ait jamais eue…

***

Susan marcha pendant plusieurs heures, sans se rendre compte du temps qui passait. La seule chose dont elle était consciente était la douleur intense qu'elle ressentait dans chaque muscle, qui semblait courir le long de ses veines. La température était extrêmement basse et il lui semblait que le froid vif et piquant la transperçait de part en part. Les larmes continuaient des ruisseler sur son visage, laissant un goût salé et désagréable sur ses lèvres. Elle arpenta machinalement les rues de Chicago, qui éveillaient divers souvenirs en elle. Partout où elle allait, quelque chose devait lui rappeler Mark, que ce soit lorsqu'elle passa devant le bar où ils avaient dansé ensemble un soir d'Halloween, ou lorsqu'elle s'approcha de la gare centrale, l'endroit où elle l'avait vu pour la dernière fois avant son départ pour Phœnix et où il lui avait avoué qu'il l'aimait. Plus elle avançait, et plus sa vue se brouillait si bien qu'elle ne vit bientôt même plus où elle allait. Elle s'engouffra dans une ruelle sombre déserte, à proximité d'un parc où il leur arrivait de se rendre autrefois, et ne vit pas l'homme qui s'approcha d'elle par derrière, sans faire de bruit. Mais d'un seul coup il surgit devant elle la menaçant d'un couteau tout en criant dans une langue étrangère. Susan comprit qu'il lui réclamait son sac à main, qu'elle avait oublié au restaurant. Elle lui dit qu'elle n'avait pas d'argent sur elle, mais l'autre, croyant qu'elle refusait de lui donner ce qu'elle avait la frappa violemment dans l'abdomen. Dans son geste, il l'effleura de son arme qui s'enfonça de quelques millimètre dans la chair au-dessus de sa hanche. Sous le choc, elle fut projetée de plusieurs mètres en arrières. Malgré la douleur qui la traversait, elle tenta de se relever. Mais l'autre était déjà revenu à l'attaque, la ruant de coup de pied tout en l'insultant dans cette langue qu'elle ne comprenait pas. Au bout de quelques minutes, il s'arrêta et s'enfuit en courant. Susan tenta une nouvelle fois de se relever, mais la douleur l'en empêcha. " Je dois avoir plusieurs côtes cassées… " pensa-t-elle machinalement. Elle fit un dernier effort pour se remettre debout, puis retomba lourdement sur le sol, inconsciente.

***

Mark se réveilla brusquement. Elizabeth n'était pas là. Elle avait été bipée d'urgences peu après qu'ils soient rentrés, car Peter Benton était souffrant et qu'il fallait quelqu'un pour le remplacer. Mark essuya son front couvert de sueur. Il venait de faire un cauchemar, ce qui ne lui était plus arrivé depuis longtemps. Il avait revu son agression, telle qu'elle s'était produite, à la différence près que lorsqu'il avait levé la tête, Susan se tenait là, le regardant, l'air terrifié. Il l'avait alors quittée du regard une seconde à peine, mais lorsqu'il avait relevé les yeux, elle avait disparu. Soudainement pris d'un mauvais pressentiment, il sortit de la chambre et essaya de téléphoner chez elle. Elle ne répondit pas. Le pressentiment se transforma alors en une sorte d'angoisse à l'idée qu'elle ne soit toujours pas rentrée chez elle. Il enfila rapidement un pantalon et une chemise par-dessus son pyjama, attrapa son manteau et sortit en coup de vent de l'appartement. Quelques secondes plus tard, il était dans la rue, sous la neige qui commençait à tomber. Il courut à travers les rues de Chicago pendant près d'une heure, se rendant dans tous les endroits où ils étaient déjà allés ensemble. Mais il ne la trouva nulle part. Il se souvint alors de ce parc, où ils avaient quelques fois emmené Suzie avant qu'elle ne reparte avec sa mère pour Phœnix. Il se souvint également de l'endroit par lequel il fallait passer pour s'y rendre, et trembla à l'idée que Susan se soit aventurée là, seule et de nuit. Il courut le plus vite qu'il le put, et arriva à l'entrée de la ruelle quelques minutes plus tard à peine. Là, il vit une forme humaine étendue sur le sol et son cœur se noua. Il s'approcha lentement, et reconnut bientôt celle qu'il aimait tant, couchée sur le dos, les jambes repliées sur le côté, la tête légèrement inclinée, le visage et les mains recouverts d'ecchymoses et une marre de sang sur sa droite. Il tomba alors à genoux, choqué au point qu'il ne savait plus que faire, tous ces réflexes de médecin les plus élémentaires l'ayant subitement abandonnés.

" Susan… je t'en prie… ne me laisse pas… " articula-t-il au milieu des larmes qui s'écoulaient sur ses joues…

***

Fin du chapitre 2


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