La Place du Coeur
Chapitre III


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Auteur:   Aline

Droits divers:   Toujours la même chose, les personnages d'Urgences ne sont pas à moi, ils ont été créés par le grand maître Michael Crichton et lui appartiennent, etc. Par contre, tous les autres personnages (Elena, les médecins de San Francisco) ont été inventés par moi.

Note:   Rien de spécial à dire, c'est la suite du chapitre précédent quoi (d'où la très grande utilité de cette note, comme si personne l'avait remarqué que c'est la suite du précédent ;O))) 'fin, j'avais juste envie de blablater un ch'tit peu, faut pas m'en vouloir ;O))

***

Susan se releva lentement et s'assit sur le bord du lit. A côté d'elle, John dormait paisiblement. Elle aurait aimé en faire de même, mais elle était incapable de trouver le sommeil, pas après ce qu'elle avait apprit un peu plus tôt. Depuis cinq ans, elle s'était désespérément accrochée à l'idée que Chloe allait bien, qu'elle était sortie définitivement d'affaire et qu'elle avait enfin réussi à prendre sa vie en main. Mais au plus profond d'elle-même demeurait cette peur - absurde croyait-elle - de la voir un jour replonger. Et malheureusement, ses craintes avaient rejoint la réalité quelques heures à peine auparavant. Elle avait tout de suite compris au ton de Joe que quelque chose n'allait pas. Lui qui avait l'habitude de plaisanter et de se moquer gentiment d'elle semblait avoir perdu tout son entrain. Il paraissait fatigué, et terriblement mal à l'aise. En tant que policier, il avait, tout comme elle en tant que médecin, déjà dû souvent annoncer de mauvaises nouvelles à des frères, des sœurs ou des parents, mais jamais cela n'avait concerné sa propre femme. Chloe avait été retrouvée quelques heures plus tôt dans sa chambre à coucher, une boîte de comprimés vide à côté d'elle. On ne pourrait pas déterminer avant qu'elle ne soit en état de parler, si elle reparlait un jour, s'il s'agissait ou non d'une tentative de suicide. Mais dans les deux cas, Chloe avait rechuté, tout avait recommencé. Joe n'avait pas voulu lui donner davantage de détails pour l'instant, il lui avait dit qu'il la rappellerait dès le lendemain. Mais Susan n'avait pas besoin de détails, elle savait très bien que sa sœur risquait de ne jamais se réveiller, et que même si elle le faisait, elle ne serait peut-être plus jamais elle-même. Elle n'avait eu que trop souvent l'occasion de constater les ravages de la drogue.

La jeune femme se glissa hors du lit en silence, et se dirigea vers la fenêtre sans faire de bruit. Dehors régnait la plus totale obscurité. La douce lumière de la lune et des étoiles avait été voilée par les nuages qui s'étaient installés dans le ciel sombre de Chicago, déversant peu à peu leurs larmes amères sur la ville endormie. Susan ferma les yeux et se laissa glisser lentement le long du mur, ravalant ses propres pleurs. Elle ne savait plus ce qu'elle devait faire, elle se sentait tellement impuissante face à ce qui, à des milliers de kilomètres d'elle, la touchait pourtant de plein fouet. Elle avait vu Chloe lors de ses pires périodes, alors que sous l'emprise de l'alcool ou de la drogue elle se trouvait incapable de se souvenir de son propre nom. Elle l'avait tant de fois aidée à se relever lorsqu'elle était au plus bas, pour la voir retomber par la suite. Mais elle s'était toujours efforcée de rester forte afin de pouvoir la soutenir encore et toujours lorsqu'elle en aurait besoin. Elle avait pris soin de Susie pendant des mois alors qu'elle ne savait rien de ce qu'elle devenait pour la voir resurgir finalement au bras de Joe, jurant qu'elle ne toucherait plus jamais à ce qui avait, à de nombreuses reprises déjà, faillit la tuer, jurant qu'elle était capable de travailler et de s'occuper de son enfant. Susan s'était battue pour garder sa nièce auprès d'elle, voulant avant tout la protéger de sa propre mère, mais cela n'avait servi à rien. Elle avait alors quitté tout ce qu'elle possédait pour les rejoindre en Arizona, et après cinq ans passés à la surveiller sans cesse, elle avait fini par admettre que, peut-être, il était temps de laisser Chloe voler de ses propres ailes, que peut-être elle n'avait plus besoin d'elle.

Mais à présent, tout recommençait. Joe lui avait demandé s'il lui était possible de se libérer pour quelques jours afin de les rejoindre en Californie, ils avaient vraiment besoin d'elle pour traverser cette épreuve si elle croyait ce qu'il lui avait dit. Elle désirait réellement être capable, une fois encore, de tendre la main à Chloe afin de l'aider à se remettre debout. Elle désirait réellement être présente pour sa sœur aînée lorsqu'elle avait besoin d'elle. Cependant, elle n'était pas sûre d'en avoir encore le courage. Elle ne se sentait plus assez forte pour affronter cela une nouvelle fois, que ce soit les crises d'hystérie de sa sœur en manque qu'il fallait presque attacher pour l'empêcher de tout détruire autour d'elle, ou les crises de larmes où elle était tellement désolée pour le mal qu'elle se causait à elle-même et à ses proches. Les reproches aussi, ceux que Susan se faisait de ne pas avoir su se montrer plus compréhensive, des années plus tôt, lorsque tout avait commencé. Elle ne voulait pas avoir à revivre tout ça, elle avait déjà donné. Elle se recroquevilla sur elle-même, enfouissant sa tête dans ses bras. Elle ne sut pas combien de temps elle était restée là, à pleurer en silence. Autour d'elle, le temps semblait s'être subitement arrêté, tandis que derrières ses yeux clos et humides défilaient des images de sa sœur, âgée de 10 ou de 30 ans, d'une Chloe tour à tour souriante puis mourante. Des images émergeant tantôt d'un temps qui lui paraissait soudain tellement lointain et où tout semblait aller pour le mieux dans le meilleur des mondes, tantôt d'un autre où elle ne percevait que douleur et tristesse. Puis s'ajouta à ses visions celle d'une petite fille de six ans, Susie, sa nièce adorée qui dans un moment pareil aurait tellement besoin d'elle.

Lorsqu'elle reprit conscience de ce qui se passait autour d'elle, John était assis par terre à ses côtés, un bras passé autour de ses épaules, la berçant tendrement contre lui. Elle releva lentement la tête et ébaucha un sourire.

"Je t'ai réveillé" s'excusa-t-elle d'une voix faible.

"Ce n'est pas toi, je n'arrivais plus à dormir…"

Il la serra plus fort, et elle se blottit contre lui. Ils restèrent longtemps ainsi sans rien dire. Il passait doucement une main dans son dos tout en lui murmurant doucement à l'oreille que tout irait bien. Elle aurait tellement voulu pouvoir le croire…

"Joe aimerait que j'aille là-bas…"

"Et qu'est-ce que tu comptes faire ?"

Susan ferma les yeux et soupira profondément. "Je ne peux pas, John…" murmura-t-elle après quelques secondes. "Je ne peux pas…"

Elle ferma les yeux et se mordit la lèvre pour étouffer un sanglot, se sentant sur le point d'éclater en larmes, mais refusant de se laisser aller. Pourquoi fallait-il qu'au moment précis où elle avait l'impression d'être enfin parvenue à obtenir la vie dont elle avait toujours rêvé tout ne bascule une nouvelle fois ?

"Chut" murmura Carter d'une voix douce qui se voulait rassurante. "Quoi que tu décides, pour l'instant tu devrais essayer de dormir un peu. On dit que la nuit porte conseil, tu y verras sans doute plus clair demain matin et tu sauras quelle décision prendre…"

Susan hocha la tête, tout en sachant pertinemment que même si elle parvenait à trouver le sommeil, ce ne serait que pour revoir encore et encore les mêmes images terribles et angoissantes qui la hantaient depuis tout à l'heure. John la prit par la main et, après l'avoir aidée à se relever, la conduisit jusqu'au lit. Elle s'y étendit et il tira la couverture sur elle, comme on borde un enfant malade. Puis il se pencha sur elle et déposa un léger baiser sur ses lèvres glacées. Il fit ensuite le tour du lit, se glissa à ses côtés et reprit sa main qu'il serra dans la sienne. Il ne la lâcha que près d'une heure plus tard, lorsque le rythme régulier de sa respiration lui indiqua qu'elle s'était enfin endormie. Elle poussa un petit soupir et se tourna sur le côté, mais ne se réveilla pas. John resta éveillé la majeure partie de la nuit, son regard ne pouvant se détacher du corps endormi de Susan, scrutant chacun des changements d'expression de son visage, l'attirant parfois contre lui lorsque, en proie sans doute à un cauchemar, elle commençait à s'agiter. Il ne pouvait s'empêcher de repenser à ce qu'il avait vécu, quatre ans plus tôt, lorsque Chase, son cousin, avait fait une overdose qui lui avait laissé de graves séquelles psychiatriques. Pendant trois ans, il n'était allé qu'une seule fois au centre où on s'occupait de lui, après cette première visite il n'avait plus jamais eu le courage d'y retourner, c'était trop dur de le voir dans cet état. Il ne pouvait donc pas blâmer Susan si elle se sentait incapable de se rendre au chevet de sa sœur, surtout s'il prenait en compte ce que Chloe et ses nombreux problèmes lui avaient déjà fait subir. Mais en même temps, il se rappelait comme si c'eut été le jour précédent de sa propre dépendance, et de ce qu'il avait ressentit. Au début, il avait rejeté furieusement toute aide extérieure qu'il considérait comme une intrusion dans sa vie privée. Il n'avait pas besoin des autres, de ses prétendus amis. Il pouvait se débrouiller tout seul. Du moins c'était ce qu'il croyait. Car sans ses amis, il aurait peut-être - certainement même - fini par mourir. Si on ne l'y avait pas forcé, il n'aurait sans doute jamais été capable de se reprendre en main, de redevenir maître de sa vie. Et en ce sens, il était certain que Chloe aurait besoin de sa sœur auprès d'elle pour s'en sortir. Mais personne ne pouvait imposer cela à Susan si elle ne s'en sentait pas la force, il fallait que ce soit elle, et elle seule, qui en prenne la décision.

***

Le jour n'était pas encore levé lorsque Carter arriva au County. Susan avait préféré rester à la maison, car elle attendait le téléphone de Joe, même si elle savait qu'en Californie il n'était pas plus de trois heures du matin. Elle avait décidé de ne pas bouger de chez elle tant qu'il n'aurait pas appelé.

Un léger vent s'était levé, et le ciel gris était chargé de nuages qui semblaient prêt à éclater à n'importe quel moment. Carter resserra machinalement son manteau sur lui pour se protéger du froid, attendant que ses collègues aient emmené à l'intérieur un blessé qui venait d'arriver par ambulance avant de rentrer lui-même. En premier lieu, il lui fallait trouver le Dr Weaver afin de lui expliquer l'absence de Susan et de la prévenir qu'en fonction des nouvelles que lui annoncerait son beau-frère, ils devraient peut-être prendre tous les deux quelques jours de congé. Car si Susan se rendait en Californie, il était déterminé à y aller avec elle, il était hors de question qu'elle ait à supporter cela toute seule. Il se dirigea vers le bureau des admissions, mais Kerry ne s'y trouvait pas. Il répondit distraitement aux salutations de Randi puis se rendit à la salle de repos pour y laisser ses affaires. Il ouvrit rapidement son casier, se débarrassa de son manteau et enfila sa blouse blanche à la place. Au moment où il refermait la porte de son vestiaire, il entendit celle de la pièce s'ouvrir et se retourna pour voir qui était entré. Abby le salua tout en se dirigeant vers la machine à café.

"Tu commences maintenant Carter ?"

"Oui" se contenta de répondre le jeune médecin en rejoignant sa collègue près de la cafetière et en se versant une tasse à son tour.

"Est-ce que tout va bien ? Tu n'as pas l'air très en forme."

"Je n'ai pas beaucoup dormi."

"Des soucis ?"

"Rien de très important."

Abby lui jeta un regard inquiet. Elle le connaissait suffisamment pour savoir qu'il mentait, mais elle préférait ne pas lui poser davantage de questions. Depuis qu'il était avec le Dr Lewis, il ne se confiait plus à elle comme c'était le cas auparavant, mais elle avait appris à ne plus insister à chaque fois qu'elle avait l'impression qu'il lui cachait quelque chose. Tout avait changé radicalement entre eux au moment même où Susan avait franchit le seuil des urgences, et aujourd'hui Abby regrettait de ne pas avoir su saisir sa chance quelques mois plus tôt lorsqu'elle en aurait eu l'occasion. Elle avait toujours été le genre de fille, puis de femme, à ne jamais réellement savoir ce qu'elle voulait et à toujours laisser passer toutes les opportunités à cause de sa perpétuelle indécision. Cependant, Carter restait tout de même son ami, et s'il était heureux avec Susan alors elle voulait bien faire un effort pour se sentir heureuse pour lui.

"Est-ce que tu participes au match samedi ?"

"Quel match ?"

"Le match de base-ball, tu n'étais pas au courant ?"

"Oh si, ça m'était sorti de l'esprit."

"Et alors, tu joueras ou pas ?"

"Je ne sais pas, mais je pense que non."

"C'est dommage, j'avais été vraiment impressionnée l'année dernière quand…"

"Tu m'excuseras Abby, mais j'ai du travail. On se voit plus tard."

Carter rinça rapidement sa tasse et la remit à sa place avant de quitter la pièce, laissant la phrase de sa collègue inachevée. Abby le suivit des yeux une seconde puis baissa le regard sur sa tasse de café encore fumante. Qu'est-ce qui lui arrive, se demanda-t-elle. Jamais encore elle ne l'avait vu comme ça, du moins pas depuis longtemps.

***

Susan fut réveillée brusquement par la sonnerie du téléphone. Elle jeta un coup d'œil à l'horloge du living room pour constater qu'il était près de neuf heures. Elle se leva rapidement du canapé sur lequel elle s'était assoupi un peu plus tôt et se précipita vers le téléphone.

"Susan Lewis ?"

"C'est moi Susan" fit la voix exténuée de son beau-frère à l'autre bout du fil.

"Joe, comment va-t-elle ?"

"C'est toi le médecin et tu y comprendrais sans aucun doute davantage que moi au charabias de ceux qui s'occupent d'elle, mais d'après ce que j'ai compris elle est stable, et elle devrait s'en sortir sans dommage… Elle a ouvert les yeux ce matin, comme si elle se réveillait le plus naturellement du monde après une longue nuit de sommeil…"

Susan poussa un profond soupir de soulagement.

"Est-ce qu'ils ont dit combien de temps ils allaient la garder ?"

"Ils ne m'ont rien dit de précis à ce sujet, mais je suppose que ça va durer un certain temps… Susan, est-ce que tu as réfléchi…"

"Je ne peux pas, Joe" l'interrompit la jeune femme.

"Susan, on a vraiment besoin de toi ici, Susie ne comprends rien à ce qui arrive, pourquoi sa mère ne rentre pas à la maison et pourquoi je passe presque tout mon temps auprès d'elle… Je crois qu'elle se sent très seule en ce moment…"

"Tu ne lui as rien dit ?"

"Comment faire comprendre à une petite fille de six ans que…"

"Pas besoin de tout lui expliquer, ça ne servirait à rien. Mais il faut qu'elle voie Chloe, c'est important pour toutes les deux…"

"Tu détournes le problème…"

"C'est faux, je te donne un conseil, c'est tout. Quant à savoir si je vais venir ou non… Je suis vraiment désolée, je… je n'ai pas la force…"

"Je comprends… Mais si tu ne le fais pas pour Chloe, fais-le au moins pour Susie…"

"Joe tu n'as pas le droit de me dire ça !"

"Tu as sans doute raison… je pensais juste que ta famille était plus importante que ta merveilleuse vie à Chicago. Il faut que je te laisse, Susan. Je te rappelle dès qu'il y a du nouveau."

La tonalité retentit, indiquant à Susan que Joe avait coupé la communication. Incapable de prononcer une parole, elle reposa le combiné et retourna dans le living room. Comment avait-il osé dire une chose pareille ? Avant aujourd'hui, jamais il n'avait connu la Chloe avec laquelle elle avait vécu pendant des années, dont elle avait supporté si longtemps et patiemment chaque nouvelle crise, chaque nouvelle rechute, chaque nouvelle promesse non-tenue. Bien sûr que sa famille était bien plus importante que le reste, ne s'était-elle pas installée à plus de deux-mille kilomètres de sa ville natale pour être plus proche d'eux ? Elle se laissa tomber dans le canapé, prenant sa tête entre ses mains comme pour empêcher la migraine de la gagner. Et si c'était lui qui avait raison ? Sa réaction n'était-elle pas, après tout, incroyablement égoïste ? Avait-elle seulement songé au désarroi que devait ressentir sa nièce face à une telle situation, une situation qui la dépassait complètement et contre laquelle elle n'avait aucun moyen de se battre ? Avait-elle réellement le droit, dans un cas pareil, de faire passer sa peur de revivre ce qu'elle avait déjà vécu avant le bonheur d'une petite fille de six ans ? Non, elle n'en avait pas le droit. Une fois encore il faudrait qu'elle se montre forte, qu'elle renferme en elle peur et colère afin d'être pour ses proches, une nouvelle fois, la main qui les rattacherait à la rive et les empêcherait de couler. Et comme l'avait dit Joe, si elle ne le faisait pas pour Chloe, ce serait pour Susie.

***

"Carter, téléphone !"

John releva la tête de l'ordinateur dans lequel il était occupé à entrer des informations concernant un patient et s'empara du combiné que lui tendait Randi. Toute la matinée il avait espéré que Susan l'appellerait, peu importe que les nouvelles aient été bonnes ou mauvaises.

"Susan ?"

"Joe a téléphoné."

"Et alors, comment va-t-elle ?"

"Elle va bien, elle s'est réveillée ce matin."

"Dieu soit loué…" soupira Carter, soulagé.

"John… j'ai beaucoup réfléchit… ça ne sera sans doute pas facile mais il faut que j'y aille… Chloe a besoin de moi, Susie a besoin de moi… J'aimerais que tu expliques ce qu'il ce passe à Kerry, dis-lui bien que je suis désolée mais que je n'ai pas d'autre choix et…"

"Attends, calme-toi d'accord ? J'en ai déjà parlé à Kerry, elle s'est montrée très compréhensive. Et pour l'instant tu vas m'attendre, je serai là dans moins de quinze minutes." Il s'interrompit une seconde avant d'ajouter plus doucement : "Je t'aime."

"Je sais…" répondit-elle dans un soupir.

Carter reposa le combiné sur son support et, sans donner aucune explication à qui que ce soit, il se précipita vers la salle de repos d'où il ressortit quelques minutes plus tard, après s'être débarrassé de ses vêtements de travail et passé son manteau. Sous le regard surpris de Randi et d'Abby qui se trouvait également là, il se dirigea vers la sortie et quitta l'hôpital.

"Qui c'était ?" demanda alors Abby en désignant le téléphone d'un signe de la tête.

"Susan Lewis" répondit la réceptionniste. "Et elle avait pas l'air d'être très en forme…"

***

Comme il le lui avait dit, Carter arriva chez Susan une dizaine de minute plus tard. Il gara la voiture devant l'immeuble sans même prendre la peine de la verrouiller et grimpa à toute vitesse les escaliers jusqu'à l'étage de l'appartement où ils vivaient. Il poussa la porte, retira son manteau qu'il jeta sur une chaise qui se trouvait dans le hall et se rendit dans la chambre à coucher où il trouva Susan occupée à remplire un sac de voyage de quelques affaires dont elle aurait besoin. Elle releva la tête en l'entendant entrer et lui adressa un sourire peu convaincu. Il s'assit à côté d'elle et l'attira contre lui.

"Est-ce que tu as déjà appelé la compagnie d'aviation ?" murmura-t-il tout en lui caressant les cheveux.

"Oui, j'ai une place réservée sur le vol de 15 heures."

"Une seule place ?"

"Comment ça ?"

"Susan, je viens avec toi."

"Tu es gentil… mais c'est hors de question… Je ne veux pas t'imposer ça, je ne veux pas que tu aies à voir Chloe dans cet état."

"J'ai déjà vu bien pire tu sais…"

"Il ne s'agissait pas de ma sœur…" répondit la jeune femme tout en se remettant à sa tâche.

"Susan, tu n'iras pas là-bas toute seule. Tu te souviens de ce que je t'ai dit hier soir ? Je t'ai dit que jamais je ne te laisserais monter seule dans un avion."

"On parlait de l'anniversaire de Susie, je crois que la situation était sensiblement différente…"

"Je t'aurais accompagné en Californie pour l'anniversaire de ta nièce, et je t'y accompagnerai pour soutenir ta sœur. Il n'y a pas de raison que je ne sois auprès de toi que pour les choses agréables."

Il avait parlé de la même voix douce et tendre qu'il avait chaque fois qu'il s'adressait à elle, et elle n'eut pas besoin qu'il tente de la convaincre davantage. N'ayant jamais eu de relation vraiment sérieuse avant lui, elle n'était pas habituée à ce qu'un homme prenne autant soin d'elle, se préoccupe autant de ce qu'elle ressentait et de ce dont elle avait besoin. En guise de réponse, elle se contenta de l'attirer plus près d'elle et de déposer un baiser sur ses lèvres douces et tièdes.

"Merci" murmura-t-elle en s'écartant de lui.

Il lui sourit, puis se releva et se dirigea vers le couloir. Quelques minutes plus tard, il avait une place réservée sur le même vol que Susan.

***

A suivre...

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