Deep in me

by Amyra

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Disclaimer : I do not own the caracters of ER, Mr Michael Crichton does, blah blah. Les paroles proviennent de la chanson Vivo per Lei, interprétée par Andrea Boccelli et Hélène Ségara.

Rating : NC-17 (spécialement la fin)

Catégorie : JC/SL Friendship/Romance

Spoilers : Début saison 8

Note de l'auteur : Ca semble être la grande mode en ce moment d'écrire du Carter/Susan, et c'est vrai qu'en y réfléchissant bien ce couple est plutôt intéressant et que touts les ont une excellente "chemistry" (désolée d'utiliser le terme anglophone, mais il me semble beaucoup plus parlant qu'en français J) à l'écran. Ceci se passe donc environ trois mois après le retour de Susan à Chicago, au début de décembre. J'en profite aussi pour faire de gros bisous à Sarah !

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   L'air froid de cette fin d'après-midi s'engouffra sous sa blouse, la faisant frissonner tout entière. Elle croisa les bras sur sa poitrine, tentant de préserver un peu de chaleur corporelle. Elle n'avait que quelques minutes de pause et n'avait aucune envie de redescendre chercher sa veste. Tandis qu'elle s'approchait du bord du toit, toute la ville se dessina sous ses yeux. Tout paraissait tellement tranquille, vu d'en haut. Seuls lui parvenaient les bruits assourdis des ambulances déversant malades et grands blessés. Mais elle n'entendait ni les klaxons des voitures, ni les piétons trop pressés qui s'insultaient les uns les autres. Et en face d'elle ne se tenait pas cette violence humaine à laquelle elle était confrontée chaque jour, ni la tristesse et les pleurs qu'elle engendre. Derrière le haut des tours gigantesques qui semblait vouloir déchirer l'azur, c'était l'immensité infinie du ciel qui a cette heure de la journée se teintait de couleurs chaudes et harmonieuses, atténuée toute fois par une légère brume. En aucun autre endroit à sa connaissance on n'avait l'occasion, dans une ville comme Chicago, d'assister à pareil spectacle. D'ailleurs, elle avait toujours aimé monter ici lorsqu'elle avait besoin d'un peu de calme, de prendre l'air, car elle était sûre de pouvoir y être tranquille. Peu de ses collègues venaient ici à cette période de l'année, ils préféraient des endroits mieux chauffés pour se détendre. Mais elle n'était pas mécontente de retrouver le froid du nord qui avait accompagné les vingt-neuf premières années de sa vie, avant qu'elle ne déménage en Arizona où l'on fêtait Noël en maillot de bain. Elle ne pouvait pas dire qu'elle avait détesté la vie là-bas car elle avait sa famille auprès d'elle, mais elle ne s'y sentait définitivement pas chez elle. Aussi, lorsque Chloe, Joe et la petite Susie étaient partis pour la Californie, elle avait saisi l'occasion pour revenir dans la ville de son enfance. Et elle ne regrettait pas son choix, bien au contraire. Au tout début il lui avait bien sûr été un peu difficile de se réintégrer à l'équipe car beaucoup de choses avaient changé depuis son départ cinq ans plutôt, mais elle avait rapidement retrouvé ses marques et les amis qu'elle avait quitté en même temps que le County et Chicago. En particulier Carter. Pourtant de tous c'était sans doute lui qui avait le plus changé. Lorsqu'elle l'avait connu, il était certes très mignon, mais dans bien des sens c'était encore un adolescent timide, qu'un rien suffisait à faire rougir. Elle le considérait un peu comme une sorte de petit frère, et à ses yeux leur relation s'arrêtait là. En plus elle se situait au-dessus de lui sur l'échelle hiérarchique, ce qui excluait toute relation entre eux. Mais aujourd'hui ce n'était plus pareil. Depuis trois mois qu'elle était revenue, ils étaient vraiment devenus très proches et elle appréciait vraiment sa compagnie. Il avait une manière de lui parler, de la regarder, qui lui donnait l'impression d'être importante, de posséder quelque chose de spécial. Il était toujours doux et attentionné à son égard, bien davantage qu'on ne l'avait jamais été pour elle. Et puis il y avait quelque chose d'autre, quelque chose de bien plus fort, quelque chose qu'elle ne parvenait à définir. Un mélange de peur et d'excitation lorsqu'il se trouvait avec elle et qui se traduisait par l'accélération des battements de son cœur et un trouble à la fois étrange et délicieux qui l'envahissait dès qu'il s'établissait entre eux le moindre contact physique. Dans des instants pareils, elle n'arrivait même plus à déterminer la nature exacte des sentiments qu'elle éprouvait pour lui. Parfois, la barrière entre amitié, amour et désir est tellement mince… Elle était toujours plongée dans ses pensées et dans la contemplation muette du coucher du soleil lorsqu'elle entendit des pas derrière elle. Elle tourna légèrement la tête et Carter lui sourit lorsqu'il apparut dans son champ de vision. Sans rien dire, il vint s'installer à côté d'elle, serrant son manteau sur sa poitrine.
   - Si tu me disais que tu décidais de partir d'installer en Alaska, je ne serais en fin de compte pas si étonné que ça, ironisa-t-il avec une petite grimace.
   Susan jeta un œil dans sa direction avec un sourire amusé. Il était évident qu'il avait quelque chose à lui dire où à lui demander, et quel que soit ce quelque chose, c'était suffisamment important pour qu'il brave le froid afin de la rejoindre ici.
   - Je me demandais, commença-t-il, est-ce que tu as quelque chose de prévu ce soir après le travail ? Je me disais qu'on pourrait peut-être aller manger quelque part…
   La jeune femme n'eut guère besoin de réfléchir avant de répondre. A la base, cette soirée aurait dû se passer comme toutes les autres : repas léger prit devant une émission idiote à la télévision, puis au lit de bonne heure. La perspective de varier un peu était loin de lui déplaire, surtout si ce temps était passé avec Carter.
   - C'est une excellente idée, répondit-elle.
   - Super ! s'exclama le jeune médecin avec enthousiasme. J'imagine que tu termine à 19h ?
   - Normalement… sauf si la Reine des Enfers Kerry Weaver n'en décide autrement, elle m'a déjà fait faire une dizaine d'heures supplémentaires depuis le début du mois sous prétexte qu'on manque de médecins…
   - J'irai plaider en ta faveur auprès de Kerry, dit Carter en rigolant.
   - Comme c'est gentil de ta part, je me demande bien ce que je ferais sans toi.
   Ils échangèrent un regard complice, jusqu'à ce qu'une nouvelle rafale de vent ne vint les glacer sur place.
   - Je n'aimerais pas avoir l'air de rouspéter, grogna John entre deux claquements de dents, mais que dirais-tu de redescendre là où grâce à la technologie nous avons une chance de ne pas mourir gelés ?
   - De toute façon ma pause est terminée, répondit Susan avec un haussement d'épaules après avoir jeté un rapide coup d'œil à sa montre.


   Les patients se succédèrent à un rythme effréné durant tout le reste de la journée, si bien que ni Carter ni Susan n'eurent le temps de voir le temps passer, et que le soir arriva sans qu'aucun des deux ne s'en soit rendu compte. Carter avait hésité à l'inviter chez lui, sa grand-mère était en voyage et aucun des employés de la maison ne ferait la grimace à une soirée de congé. Toutefois, il avait finalement décidé de s'en tenir à son idée de base et de l'emmener manger quelque part en ville, il ne souhaitait pas avoir l'air de brusquer les choses entre eux. Il ne savait pas vraiment où ils en étaient exactement, juste des amis ou davantage que ça ? Ils passaient beaucoup de temps ensemble, elle l'avait même initié au yoga, ce qui s'avérait être une merveille pour son dos. Et puis ils avaient eu cette discussion quelques semaines plutôt, durant laquelle il lui avait avoué que le béguin qu'il avait à son égard lorsqu'il était étudiant était en train de renaître depuis quelques temps. En fait, il avait renaquit presque instantanément lorsqu'il l'avait revue et ses sentiments à son égard n'avaient depuis fait que grandir. Mais ne sachant pas ce qu'il en était pour elle, il avait peur de faire le premier pas, peur qu'elle se sente prise au piège et ne sache quoi lui répondre. Il préférait attendre, laisser les choses suivrent leur cours. Après tout si quelque chose devait se passer entre eux, ça finirait bien par arriver. Une main qui passa rapidement devant ses yeux ramena le jeune médecin à la réalité. Susan se tenait devant lui, enveloppée dans une veste en imitation cuire franchement usée et une grosse écharpe de laine grise.
   - A quoi est-ce que tu penses ? demanda-t-elle lorsqu'il fixa ses yeux sur elle.
   - Rien de spécial, mentit-il. On y va ?
   La jeune femme répondit d'un hochement de tête et passa son bras sous le sien.
   - Où est-ce que tu m'emmènes ?
   - C'est toi qui décide, mais je connais un petit bar italien à une dizaine de blocs d'ici où ils servent des spécialités de pâtes tout simplement délicieuses.
   - Je te fais confiance, de toute façon je n'ai pas de meilleure idée et pour l'instant tes goûts culinaires ne se sont pas avérés trop mauvais, répondit-elle avec un petit sourire.
   Ils traversèrent rapidement la place située devant l'entrée des urgences et réservée aux ambulances pour rejoindre le parking extérieur de l'hôpital.
   - Tu sais, fit remarquer Susan en entrant dans la 4x4 de son collègue, à cette saison tu ferais vraiment mieux de garer ta voiture en bas, il ferait moins froid à l'intérieur.
   - J'ai horreur du parking souterrain, en plus l'éclairage y est tellement mauvais, ça prend une demi-heure rien que pour trouver ses clés.
   Bien qu'elle connaissait pertinemment la raison réelle du refus de John à laisser sa voiture dans le parc couvert, elle n'insista pas et changea de sujet de conversation.
   - Comment va ta grand-mère ?
   - Un peu mieux, même si elle refuse toujours de prendre du repos. Mais son médecin dit qu'elle est résistante et qu'elle se remettra.
   - Et toi qu'en penses-tu ?
   - Que si elle acceptait de rester couchée, elle serait complètement sur pieds en deux semaines, peut-être trois. Mais c'est une vraie tête de mule !
   - Ca doit être un trait de famille des Carter, fit remarquer Susan avec un petit sourire.
   - Parce que je suis têtu moi ?
   - Regarde la route.
   - Tu ne réponds pas à ma question.
   Susan tourna la tête vers lui et ils échangèrent un regard amusé, avant que la jeune femme ne lui conseille à nouveau de se concentrer sur la route, et il se retint de lui dire à quel point il lui était difficile de rester concentré sur autre chose qu'elle lorsqu'elle était auprès de lui.


   Il ne leur fallu que quelques minutes pour arriver au bar dont Carter lui avait parlé. Il sortit le premier de la voiture, puis fit le tour du véhicule pour l'aider à descendre car le sol était complètement gelé et par conséquent très glissant. Dès qu'il entrèrent dans le petit établissement, ils furent accueilli par l'odeur aromatisée d'épices de diverses sorte et d'huile d'olive, ainsi que par l'air entraînant d'une chanson italienne interprétée par un homme qui se tenait au fond du bar, sur une petite estrade. Au même moment, un autre homme qui devait être le patron s'approcha d'eux.
   - Mr John ! s'exclama-t-il avec accent prononcé. Cela faisait longtemps que vous n'étiez pas venu nous rendre visite. Oh et je vois que vous avez amené une amie !
   - Giovanni, je vous présente Susan, répondit Carter tandis que la jeune femme serrait la main que lui tendait le dénommé Giovanni.
   - C'est un honneur mademoiselle, fit celui-ci avant de se tourner à nouveau vers Carter. J'ai une table de libre par ici qui sera parfaite.
   Le tenancier du restaurant les conduisit jusqu'à une table inoccupée, puis les laissa après leur avoir annoncé qu'on viendrait prendre leur commande dans quelques minutes.
   - Tu as l'air d'être un habitué, fit remarquer Susan après qu'ils se furent installés.
   - Je venais souvent ici avec ma grand-mère, mais la dernière fois doit bien remonter à deux ans.
   La jeune femme jeta un rapide coup d'œil autour d'elle. Au fond, devant l'estrade, quelques enfants se trémoussait au rythme cadencé de ce qui devait être un air traditionnel italien. Juste à côté se trouvait un bar où se tenaient plusieurs hommes buvant des bières et échangeant des commentaires sur le dernier match de football auquel ils avaient pu assister. La salle à manger elle-même n'était constituée que de six ou sept tables, toutes occupées à l'exception d'une.
   - En tout cas cet endroit est vraiment adorable !
   - Je savais que ça te plairait.
   - Vraiment ?
   - Vraiment.
   Elle lui sourit d'une manière étrangement sensuelle, et à ce moment précis il ne désirait plus qu'une seule chose : quitter ce restaurant et lui faire l'amour n'importe où, même dans la voiture s'ils ne trouvaient pas d'endroit plus approprié. Au lieu de cela, il se contenta d'étendre le bras pour effleurer sa main posée sur la table du bout de ses doigts. Elle eut un léger sursaut à ce contact inattendu qui suffit à faire déferler en elle un océan d'émotions. Elle soutint son regard quelques secondes, puis détourna les yeux. Depuis tout à l'heure elle ne pensait qu'à la douce sensation que produirait en elle le contact de ses lèvres sur les siennes, qu'au goût qu'aurait sa langue dans sa bouche. Mais elle avait toujours été trop raisonnable pour se laisser aller à ce genre de fantasme. Même si elle souhaitait embrasser Carter plus que quoi que ce soit d'autre en cet instant, il valait mieux qu'elle n'y songe même pas.
   - La carta ! fit alors un jeune homme d'une vingtaine d'années en leur tendant un morceau de carton plastifié sur lequel étaient énumérés les différentes variétés de pâtes et de sauces qu'ils pouvaient combiner.
   Carter retira sa main pour s'emparer de sa carte et elle en fit de même. Après quelques secondes de réflexion, il commanda des tagliatelles au saumon et Susan demanda la même chose que lui. Face à un choix pareil, elle ne savait tout simplement pas quoi choisir. Leur repas arriva une dizaine de minutes plus tard à peine, accompagné d'une bouteille de vin rouge offerte par la maison.
   - C'est délicieux, s'exclama Susan après avoir goûté ses pâtes. 
   - Je ne t'ai pas emmenée ici pour rien, répondit Carter, ravi qu'elle apprécie son repas. Santé ! ajouta-t-il en levant sin verre de vin.
   Elle imita son geste, puis tous deux mangèrent en silence, échangeant juste de temps à autre un regard ou un sourire. John garda en réalité les yeux fixés sur elle durant la quasi-totalité du repas, ne pouvant détacher son regard d'elle. Chacun des gestes qu'elle faisait le fascinait, de la manière qu'elle avait de repousser une mèche de cheveu derrière son oreille à celle dont elle portait sa fourchette à ses lèvres après avoir légèrement soufflé sur les pâtes fumantes. Quant à elle, elle avait remarqué l'intérêt qu'il lui portait, mais étrangement elle ne se sentait pas mal à l'aise comme ça aurait été le cas si la personne assise en face d'elle avait été quelqu'un d'autre. Elle aimait tellement quand il la regardait de cette façon, comme si elle avait été la chose la plus précieuse au monde. Rares étaient les fois où elle avait ressentit cela lorsqu'elle se trouvait avec un homme. Tandis qu'ils mangeaient, le répertoire du chanteur avait passé de chansons aux rythmes entraînant à d'autres, plus lentes, plus douces, et quelques couples avaient pris la place des enfants devant l'estrade.
   - Est-ce que tu veux danser ? demanda Carter lorsqu'ils eurent terminé et que le jeune serveur soit venu débarrasser leurs assiettes vides.
   - Tu n'es pas sérieux ?
   - Pourquoi pas ? Ce serait pour moi un honneur si vous m'accordiez cette danse, Dr Lewis.
   - Dans ce cas, Dr Carter, ce sera un honneur pour moi d'accepter.
   Ils se levèrent tous les deux et, la prenant par la main, il l'entraîna vers la piste de danse improvisée. Ils demeurèrent tout d'abord à une distance respectable l'un de l'autre, comme deux adolescents timides sortant pour la première fois sans leurs parents, laissant la musique s'insinuer en eux.

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Vivo per lei da quando sai
la prima volta l'ho incontrata
non mi ricordo come ma
mi è entrata dentro e c'è restata
vivo per lei perchè mi fa
vibrare forte l'anima
vivo per lei e non è un peso

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   Tout en se laissant bercer par la douce mélodie et les paroles qu'aucun d'eux ne comprenaient, ils se rapprochèrent sensiblement l'un de l'autre. Elle ne sut pas si c'était à cause du vin ou de la sensation du corps de John tellement proche du sien, mais elle se sentit soudain perdre l'équilibre et se retrouva tout contre lui, son visage séparé du sien par quelques centimètres à peine. Un instant, elle imagina qu'ils brisaient cette barrière invisible et que l'espace entre eux n'existait plus.
   - Tout va bien ? demanda-t-il en la soutenant.
Elle hocha juste la tête, et cette fois n'eut plus peur de se blottir contre lui, appuyant sa tête sur son épaule. Elle sentit ses bras se resserrer autour d'elle comme pour la retenir pour toujours auprès de lui, et elle soupira doucement tout en fermant les yeux.

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Vivo per lei anch'io lo sai
e tu non esserne geloso
lei è di tutti quelli che
hanno un bisogno sempre acceso
come uno stereo in camera
di chi è da solo e adesso sa
che è anche per lui , per questo
io vivo per lei

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   La soirée prit fin trop tôt à leur goût, mais il valait mieux qu'ils rentrent avant qu'il ne soit trop tard. Lorsqu'ils quittèrent le restaurant, ils constatèrent qu'il s'était mis à pleuvoir tellement violemment que les quelques minutes qu'il leur fallut pour regagner la voiture leur suffit à être mouillés jusqu'aux os. Arrivés devant l'immeuble où elle vivait, il insista malgré tout à monter avec elle, hésita à l'embrasser sur le pas de sa porte puis décida de ne pas le faire. Il s'apprêtait à tourner les talons lorsqu'elle poussa une exclamation de contrariété.
   - Qu'est-ce qu'il y a ?
   - J'ai oublié mes clés, et ma colocataire n'est pas encore rentrée, soupira-t-elle.
   - Je ne savais pas que tu avais une colocataire.
   - Tu serais sans doute moins étonné si tu connaissais le montant des loyers dans ce quartier.
   - Oui sans doute… En attendant, tu ne vas pas l'attendre pendant je-ne-sais combien de temps dans ses vêtements trempés…
Il hésita quelques secondes avant de continuer. Toute la soirée, il avait souhaité lui proposer de venir chez lui sans trouver la manière de le faire. Il n'allait tout de même pas laisser passer sa chance.
   - Tu n'as qu'à venir chez moi, je te raccompagnerai plus tard, quand elle sera rentrée…
Susan lui adressa un sourire reconnaissant et hocha la tête, réalisant qu'inconsciemment elle avait espéré qu'il l'inviterait, même si elle s'interdisait de penser à ce qui pourrait se passer s'ils se retrouvaient seuls dans la grande maison des Carter - priant en même temps pour qu'il n'y ait personne d'autre, juste eux-deux. Ils ressortirent donc de l'immeuble, bravant une nouvelle fois le déluge qui s'abattait sur la ville. Le trajet jusqu'au manoir ne dura qu'une dizaine de minutes, mais pendant ce temps ils eurent tous deux l'occasion de réfléchir à la situation, à ce qu'ils ressentaient dans leur corps et dans leur cœur mais qu'ils craignaient d'exprimer. Tout cela était tellement frustrant !
   - Je n'était jamais venue chez toi, c'est vraiment immense, murmura Susan, impressionnée, lorsque John la fit pénétrer dans le gigantesque hall.
    Sans rien dire, il referma la porte derrière elle et la verrouilla, puis lui prit doucement la main. Elle se retourna vers lui et lui sourit. Sans la lâcher, il se rapprocha d'elle, et elle sentit une décharge électrique lui courir le long de l'échine.
    - Je vais te donner de quoi te changer, murmura-t-il sans la quitter des yeux.
    Elle hocha la tête, et il l'entraîna au premier étage. Susan se sentait bizarre. Il y avait une telle tension entre eux, c'était quelque chose d'indéfinissable.     Il l'emmena jusqu'à sa chambre et ouvrit une armoire où se trouvaient ses propres vêtements.
   - Je te donnerais bien quelque chose de plus féminin, mais ma sœur n'habite plus ici depuis longtemps, et je ne suis pas certain que les tailleurs de ma grand-mère…
   - Ca ira très bien John, merci, murmura-t-elle avec un petit sourire.
   - Bien, dans ce cas je vais te laisser te changer, je vais aller préparer un peu de thé chaud. Quand tu auras terminé, tu n'auras qu'à m'attendre dans le petit salon, juste ici.
   La jeune femme hocha la tête, et John la laissa seule. Elle resta rêveuse quelques instants avant d'écarter les chemises et pantalons de Carter afin de trouver quelque chose de confortable à enfiler. Pendant ce temps, John redescendit pour se rendre dans la cuisine, où il resta volontairement un certain temps, oubliant pourquoi il était, initialement, venu ici. Il avait juste besoin de reprendre ses esprits. La présence de Susan avait sur lui le plus merveilleux des effets, son sourire illuminant son visage suffisait à lui faire oublier tous ce qui n'allait pas, où n'était pas allé, dans sa vie. Il rêvait de respirer le parfum de sa peau, d'en éprouver la douceur sous ses doigts. Il voulait s'enivrer de son odeur, se fondre en elle et lui appartenir. Maintenant qu'ils étaient là, tous les deux seuls dans cette immense maison, qu'allait-il se passer ? Il était impossible qu'elle n'ait pas ressentit cette attraction qui semblait s'exercer entre leurs deux corps, mais oseraient-il sauter le pas ? Où allaient-il rester assis l'un à côté de l'autre, sans se parler ni se toucher jusqu'à ce qu'elle doive partir ? Il n'arrivait par à anticiper, il n'avait aucun contrôle sur la situation. Il prit une profonde respiration, puis se décida à la rejoindre. Lorsqu'il entra dans la pièce, il remarqua qu'elle s'était endormie sur le large canapé, après avoir retiré ses vêtements mouillés pour revêtir un gros sweater marron et un pantalon de survêtement en coton gris lui appartenant tous deux. Il s'approcha à pas feutrés, faisant attention à ne pas faire de bruit. Pour rien au monde il n'aurait voulu troubler son sommeil. Il s'installa dans un fauteuil en face d'elle, et resta plusieurs minutes à la regarder fixement, comme s'il voulait apprendre par cœur chaque contour de son visage, chacun de ses traits doux et délicats. Elle avait l'air si paisible, et était tellement belle… Il se leva lentement, déposa un baiser sur son front puis, retournant dans son fauteuil, s'endormit à son tour. Lorsqu'il ouvrit les yeux un peu plus d'une heure plus tard, ce fut pour constater qu'elle était déjà réveillée et qu'à présent c'était à son tour de l'observer. Au moment où leurs regards se croisèrent, elle détourna brusquement le sien, son teint s'empourprant légèrement à l'idée de s'être laissée surprendre dans sa contemplation. Cela le fit sourire, il n'avait jamais imaginé qu'il verrait un jour le Dr Lewis rougir. D'ailleurs, il trouva cela particulièrement sexy. Il se releva alors lentement et vint s'asseoir à côté d'elle sur le canapé. Elle baissa les yeux, fuyant instinctivement son regard. Bien sûr elle avait envie de lui, mais en même temps cela lui faisait peur. Jamais elle ne se serait autorisé à ressentir cela pour le Carter qu'elle avait connu des années auparavant. Mais à présent tout était devenu tellement différent… La relation élève-professeur qu'ils avaient entretenue des années auparavant venait à l'instant de se briser définitivement pour ne plus laisser apparaître que ce qu'ils étaient réellement : un homme et une femme, deux adultes qui ne pouvaient plus dissimuler plus longtemps leur désir mutuel. Il ne prononça pas un mot, se contenta de laisser glisser un doit le long de sa joue douce et rose. Elle sursauta au contact de ses doigts sur son visage, puis osa enfin relever la tête et plongea son regard dans le sien. Ils demeurèrent alors plusieurs minutes ainsi, comme fascinés l'un par l'autre, sans que rien d'autre ne soit échangé que ce long regard qui à lui seul en disait tant. Il posa sa main sur la sienne et leurs doigts s'entremêlèrent, puis il osa enfin se rapprocher d'elle. Leurs deux visages n'étaient plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, et elle pouvait sentir sa respiration saccadée sur son visage.
   - Vous êtes nerveux, Mr Carter ? demanda-t-elle dans un souffle.
   - Pas le moins du monde… répondit-il en passant doucement une main dans ses cheveux dorés.
   Ce n'était pas tout à fait vrai. Il l'avait tellement rêvé, cet instant magique qui n'appartiendrait plus qu'à eux, cet instant où ils auraient l'impression d'être seul au monde et où plus rien d'autre n'aurait d'importance. Juste elle et lui, ensemble, enfin. Il voulait tellement que tout soit parfait, il voulait tellement qu'elle le désire autant que lui… Comme si elle avait lu dans ses pensées, elle approcha son visage plus près encore du sien et murmura à son oreille : "Menteur…" avant de déposer un baiser juste au coin de ses lèvres, un baiser doux et chaste qui cachait toutefois une invitation plus claire que si elle l'avait formulée avec des mots. Passant une main derrière sa nuque, il attira alors sa bouche contre la sienne et l'embrassa avec une douceur et une tendresse qu'elle n'avait jamais connue auparavant. En un instant il lui fit oublier les quelques hommes qui avaient partagé sa vie et elle eu l'impression d'être embrassée pour la toute première fois. Elle aurait aimé que cette sensation ne s'arrête jamais, mais elle sentit ses lèvres quitter les siennes pour se glisser dans son cou.
   - Pas trop vite… murmura-t-elle.
   - Je n'irai pas trop vite, promit-il.
   Mais déjà elle s'abandonnait à la douce et chaude caresse de ses lèvres sur sa peau et à tout ce que cela faisait naître de délicieux en elle. Il la renversa doucement en arrière et s'étendit au-dessus d'elle avant de glisser timidement une main sous son t-shirt. Elle émit un léger gémissement en sentant ses doigts courir le long de son dos et sur sa poitrine, ce qui l'encouragea à devenir toujours plus entreprenant. Il lui ôta complètement son t-shirt puis s'attaqua au soutien-gorge qu'il eut un peu de peine à dégrafer, ce qui arracha à Susan un petit rire. Lorsqu'il parvint enfin à l'en débarrasser, elle frissonna légèrement au contact de l'air frais sur sa peau nue.
   - Je vais fermer la fenêtre, murmura-t-il, ne bouge pas.
   - Ce n'était nullement dans mes intentions… répondit-elle avec un petit sourire suggestif. 
   Il revint vers elle et s'agenouillant au pied du divan fit glisser son survêtement le long de ses jambes. Puis il reprit sa place sur le canapé et ce fut à son tour de l'aider à se débarrasser de ses vêtements, en commençant par sa chemise dont elle défit lentement chaque bouton tout en effleurant son torse du bout des doigts, et tandis qu'il continuait de la couvrir de baiser et de caresses. Elle retira doucement la chemise qui alla rejoindre sur le sol le tas formé par ses propres vêtements, puis il décida de l'aider en voyant qu'elle avait un peu de mal avec sa ceinture. Quelques secondes plus tard, son pantalon se retrouvait également par terre. Il ne leur restait à chacun plus que leurs sous-vêtements, dont ils eurent vite fait de se débarrasser, comme s'ils avaient subitement pris feu. Il la contempla quelques instants, passant une main dans ses cheveux, conscient de ce qui allait finalement se passer entre eux et savourant la magie de cet instant unique. Puis, reprenant ses baisers, il laissa glisser ses doigts le long de ses hanches, de son ventre, pour rejoindre enfin les parties les plus intimes de son anatomie. Elle eut un soubresaut et il sentit tout son corps se tendre sous lui. Elle aimait ça. Il sourit, l'embrassa doucement tout en augmentant l'intensité de ses caresses. Elle laissa échapper un petit cri qu'il assourdit en déposant à nouveau ses lèvres sur les siennes. Elle se cambra en sentant les vagues de plaisir déferler en elle comme un raz-de-marée tandis qu'il jouait avec elle, et d'une main elle s'accrocha à son cuir chevelu tout en gémissant son nom. Elle était au bord de l'orgasme et, désireuse de lui faire partager ce qu'elle ressentait, elle noua ses jambes autour de sa taille, attirant son corps brûlant tout contre le sien. Il pénétra alors doucement en elle et lorsque leurs deux corps se fondirent l'un dans l'autre il ne formèrent plus qu'un. Ils jouirent ensemble, puis retombèrent, épuisés et en sueur l'un à côté de l'autre. Ils restèrent sans bouger pendant un temps qui leur parut durer pour toujours, rien d'autre ne venant troubler la perfection du silence qui les unissait que le bruit irrégulier de leur respiration. Puis il roula à nouveau sur elle, prit délicatement son visage entre ses mains et l'embrassa tendrement. Elle passa ses bras autour de sa nuque puis laissa courir librement ses mains le long de son dos.
   - John… murmura-t-elle lorsqu'elle sentit ses lèvres descendre doucement sur son cou.
   - Oui ?
   Il releva la tête et la regarda fixement. Elle arborait soudain un air grave, presque triste, et il se demanda ce qui lui arrivait.
   - Est-ce que quelque chose ne va pas ? demanda-t-il, cachant de son mieux son inquiétude.
   Elle répondit d'un soupir et secoua légèrement la tête, fuyant cependant son regard.
   - C'est juste que…
   - Que ?
   - C'est tellement bizarre… Jamais je n'aurais songé que… enfin si j'y avais déjà songé, mais tu comprends je…
   - Croyais que nous n'étions que des amis ? acheva-t-il à sa place.
   Elle hocha la tête.
   - Mais je me rends compte que… qu'il y a bien plus… oh John je ne sais même pas comment c'est arrivé !
   - Comment quoi est arrivé ? demanda-t-il avec un petit sourire tout en écartant une mèche blonde qui s'était glissée devant ses yeux.
   - John je crois que… je suis en train… en train de tomber amoureuse de toi… avoua-t-elle d'une voix tremblante
   Il ne répondit rien et se contenta de l'entourer de ses bras, la serrant tout contre lui.
   - Je t'aime, Susan… murmura-t-il alors. Je ne savais pas comment te le dire… mais en fin de compte ça paraissait beaucoup plus difficile que ça ne l'était vraiment, ajouta-t-il en souriant. 
    Elle enfouit sa tête dans le creux de son épaule et il sentit son corps se détendre. En cet instant précis, ils ne désiraient plus rien d'autre que d'être ensemble, comme si le reste du monde avait cessé d'exister. Après quelques instants de répit, leurs lèvres se trouvèrent une fois de plus, ils échangèrent un long baiser fiévreux, et donnèrent à nouveau libre cours à la passion et au désir dévorant qui les rongeait tous deux.

THE END

Amyra, November 2001